Un chemin en terre, Un chemin en tête

Un regard écologique du voyage

Misère et Humanité

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Nous n’avions pas du tout prévu d’arriver à Calcutta mais les tracasseries du web pour acheter nos billets d’avion (et leur coût) nous ont finalement amené à réserver 15 jours avant notre arrivée dans ce pays, un vol Bangkok – Calcutta.

L’arrivée dans la ville la plus densément peuplée d’Inde a été, il faut le reconnaître, un changement radical : beaucoup de monde, les rickshaw tirés par des hommes plutôt âgés (et oui, ils existent encore quand ils ont été remplacés par des motos, et plus rarement des vélos, dans tous les autres pays asiatiques) côtoyant les vélos, les motos, les voitures, les taxis et bien sûr les nombreux piétons, le tout sous un concert de klaxons permanent. La pauvreté et la misère sont là, omniprésentes avec les mendiants, les lépreux, les mutilés qui nous interpellent, nous la petite famille « riche » française marchant au milieu de cet « autre » monde.

Nous avions un peu préparé les enfants, mais ils semblent, eux, plutôt bien s’adapter à ce nouveau pays, remarquant effectivement la misère de chaque instant et nous demandant le plus simplement du monde pourquoi nous ne donnons pas plus souvent de l’argent aux mendiants.

Il est vrai que les enfants sont « habitués » (si tant est qu’on puisse l’être) à cette misère chez nous à Lyon, quand au moment de partir à l’école nous croisions souvent le matin des personnes fouillant les poubelles de notre immeuble, à la recherche de quelque denrée ou bien quand nous découvrions une famille qui dormait dans le jardin des Petites Sœurs (avec des enfants en bas âge).

Le/a voyageur/se est toujours plus prompt à remarquer la misère sous toutes ses formes (écologique, sociale, etc.) à l’extérieur que chez soi. En France, il est facile de ne pas la voir en ne prenant pas le métro et en ne fréquentant pas certains quartiers (et il est bien dommageable d’ailleurs pour notre société que les politiques et riches de notre pays ne la côtoient jamais cette misère, pourtant bien présente sur notre territoire). Mais, ici en Inde, cette misère humaine vient à nous, elle nous interpelle à chaque instant dans la rue et il nous faut composer un nouveau schéma mental.

De nombreux touristes et Indiens plus riches ne regardent pas les mendiants (ne les « calculent pas ») et se réfugient dès que possible dans des endroits « à l’abri » : maison, hôtel, restaurant, etc.

D’autres comme nous, se questionnent sur leur impact, se demandent quand et à qui donner (pas aux enfants, pas à tout le monde c’est impossible) et font leur petite cuisine interne un peu comme ils peuvent la faire dans leur propre pays selon des règles personnelles pas toujours bien définies (ni toujours très justes d’ailleurs).

Et il y a des personnes (beaucoup de jeunes chrétiens (mais pas que), pour ce que j’ai pu en voir ici, mais qui restent très discrets sur le sujet) qui viennent donner de leur temps, de leur personne, pour apporter leur contribution à l’atténuation de cette misère.

Nous sommes restés 3 jours à Kolkata (Calcutta) dans un hôtel le « Galaxy », très chaleureux, pas tant pour ses chambres décrépies que pour l’attention et la gentillesse du patron ainsi que pour les échanges très riches entre voyageurs.

Nous avons eu ainsi plusieurs conversations avec de toutes jeunes personnes (18 à 25 ans) venues passer un mois, parfois davantage, plus rarement moins, dans la congrégation créée par Mère Teresa. Elles nous ont raconté leur quotidien, fait de lessives principalement et aussi d’aide à la personne (accompagnement pour manger, se laver, etc.), sans fausse pudeur, sans prétention, mais avec beaucoup de délicatesse et souvent beaucoup de questions sur leur rôle, leur action et leurs limites. Les « Mother houses » accueillent justement une partie de la misère des rues : beaucoup de femmes et d’hommes vieux, malades, souvent handicapés (mentaux et physique) à qui elle offrent un toit, de quoi manger et un peu d’attention humaine. Devant l’ampleur de ce qu’il y aurait à faire, cela pourrait sembler insuffisant et en même temps c’est immense.

J’ai discuté un moment avec une jeune fille qui avait déjà beaucoup réfléchi à cette question du don et qui me semblait d’une grande maturité. Elle n’était pas dupe sur toutes les « offres » de volontariat qui existent en Asie et en Afrique : beaucoup sont un moyen de se faire de l’argent en surfant sur l’envie des jeunes de se rendre utiles, à bon compte, durant leur voyage. Ainsi donner quelques cours d’anglais ou de français, « s’occuper » d’orphelins, faire des chantiers « humanitaires », etc.

Mais dans la congrégation de Mère Teresa, il y a besoin de bras et toutes les bonnes volontés sont bienvenues, sans besoin de qualification particulière. On peut donc se présenter directement sur place et commencer immédiatement pour la durée de son choix.

Et c’est ainsi que ces jeunes, au lieu de détourner le regard, décident eux, de regarder bien en face la vie dans toutes ses composantes, si dure pour une partie de l’humanité. Ils apportent leur modeste mais si utile contribution, sans se contenter de beaux discours. Une belle leçon d’humanité.

Olivia, publié le 8 avril 2017 depuis Agra

3 Commentaires

  1. Grande inconnue l’Inde… Impatiente d’en apprendre plus grâce a vous 5 ! Merci bonne route et bon courage !

  2. Il est tout à fait vrai que tant qu’on est pas confronté directement à la misère dans le face à face, et plus encore dans le face à face du regard, on « oublie » que celle-ci existe. En beaucoup de lieux il est possible de vivre totalement à l’écart de la misère, qui se concentre dans des quartiers, des villes, des pays… que l’on peut ne jamais fréquenter.

    Merci pour la fenêtre que vous ouvrez sur ces réalités du monde 🙂

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